En 1996, la loi sur l’équité salariale visait à supprimer les iniquités salariales entre les hommes et les femmes au Québec… Mais depuis 20 ans et alors que bon nombre d’entreprises en sont rendues à leur exercice de maintien d’équité salariale quel est le bilan de cette loi?

La loi sur l’équité salariale a été adoptée à l’unanimité le 21 novembre 1996. Elle a pour but de corriger, à l’intérieur d’une même entreprise les écarts salariaux dus à la discrimination fondée sur le sexe dans les catégories d’emploi à prédominance féminine. (article 1) Elle vise les entreprises de 10 salariés et plus.

L’objectif est d’éliminer les préjugés sexistes encore bien enracinés dans les pratiques salariales. Dans le calcul du salaire et parce qu’ils sont associés à des qualités personnelles dites féminines, on ignore encore trop souvent des aspects du travail féminin devant être payés à sa juste valeur. La discrimination systémique à l’égard des emplois traditionnellement ou majoritairement féminins peut causer des injustices que les mesures sur l’équité salariale veulent endiguer.

 

La situation évolue-t-elle?

Dix ans après son entrée en vigueur et cinq ans après l’échéance qu’elle fixait, il était apparu dans un rapport publié par le Ministre du Travail sur la mise en œuvre de l’équité salariale, qu’environ 50 % des entreprises ne s’étaient pas conformées à leur obligation.

Mais en 2016, alors que la loi venait de fêter ses 20 ans, elle commençait à porter ses fruits. La rémunération des hommes et des femmes affichait un écart de 2,93 $ l’heure en 2016. Toutefois, les femmes ont amélioré leur situation durant la dernière décennie. S’il n’a pas disparu, l’écart s’estompe progressivement. Il passe en effet de 86,6 % à 88,6 % de la rémunération des hommes.

 

Une question québécoise ? 

La prise de conscience et cette volonté de gommer les écarts n’existent pas qu’au Québec mais la recherche d’équité est initiée à l’échelle mondiale. La disparité est réelle dans de nombreux pays.

Aucun pays n’a réussi à combler complètement l’écart entre les hommes et les femmes. Néanmoins, les cinq pays en tête de liste, dont le Rwanda, ont réduit 80 % des disparités.

En 2016, le Forum Économique Mondial a publié un rapport sur la parité entre hommes et femmes. Il indique que la parité économique entre les sexes pourrait encore prendre 170 ans après le recul dramatique des progrès.

 

Quel avenir pour l’équité salariale?

Le gouvernement du Canada est résolu à éliminer les obstacles à l’égalité des sexes. Il cible les secteurs de l’éducation, de l’emploi et de l’entrepreneuriat. De cette façon, il souhaite que les femmes puissent contribuer à l’économie croissante du Canada et à en bénéficier.

Dans le budget de 2018, le gouvernement propose de présenter des mesures législatives historiques sur l’équité salariale proactive. La loi s’inspirera des modèles de l’Ontario et du Québec. Elle adoptera une approche novatrice afin de s’assurer que les femmes et les hommes travaillant dans les secteurs sous réglementation fédérale reçoivent, en moyenne, une rémunération égale pour un travail de valeur égale. Selon les premières estimations, cette démarche pourrait rétrécir l’écart salarial entre les sexes. Il passerait ainsi pour de 91,4 cents à 94,1 cents dans l’administration publique centrale et de 88,1 cents à 90,7 cents dans le secteur privé fédéral. Cependant, cette analyse sera précisée au cours du cheminement des mesures législatives.

 

S’il reste du chemin à faire, la condition des femmes dans le monde du travail reste au cœur des préoccupations. Certains continuent de s’interroger sur les mesures qui pourraient être prises pour les salariés présents dans les entreprises de moins de 10 employés. En effet, celles-ci ne sont pas visées par la loi en sa forme actuelle alors que le Québec est un « champion des PME ».

La loi devrait être révisée en 2019… 

Peut-être intégrera-t-elle un champ plus large pour poursuivre les avancées initiées près de 25 ans plus tôt…


Sources :

  • 1  http://legisquebec.gouv.qc.ca/fr/showDoc/cs/E-12.001
  • 2  https://www.ledevoir.com/societe/479890/les-20-ans-de-la-loi-sur-l-equite-salariale
  • 3  http://www.lapresse.ca/affaires/economie/international/201610/26/01-5034595-il-faudra-170-ans-pour-atteindre-lequite-salariale-dans-le-monde.php
  • 4  https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1020714/remuneration-femmes-hommes-amelioration-dix-ans-annuaire-institut-statistique-quebec-equite-salariale
  • 5   http://www3.weforum.org/docs/Media/GGGR16/GGGR16_FR.pdf
  • 6   https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1020261/egalite-homme-femme-carte-forum-economique-mondial
  • 7   https://www.fin.gc.ca/n18/docs/18-008_7-fra.pdf

Ce texte ne constitue pas un avis professionnel. Les lecteurs ne devraient pas agir sur la seule foi des informations qui y sont contenues.


À propos de Manon Perreault

À la tête de Perreault & Associés, Manon Perreault, CRHA, conseille et accompagne les gestionnaires et chefs d’entreprise de PME québécoises et d’OSBL dans leurs pratiques de gestion des ressources humaines et de gouvernance. Elle concentre sa pratique professionnelle en prévention du harcèlement psychologique et en climats de travail sains. Elle rêve d’ailleurs que les organisations voient le harcèlement dans une perspective éthique plutôt que juridique. Elle a développé une démarche unique quant à la prévention de toutes formes de conflits. Outre sa formation en prévention du harcèlement, Manon donne aussi des formations en éthique ainsi qu’en gouvernance au sein des organismes sans but lucratif tout en les accompagnant dans la mise en place de cadres éthiques et de gouvernance. Elle met aux services des organisations les réflexions et les concepts éthiques développés dans le cadre de sa maitrise en éthique appliquée obtenue en 2018. Elle connait bien le système professionnel québécois ayant siégé à plusieurs conseils d’administration, notamment celui de l’Ordre des conseillers en ressources humaines où elle a été membre du comité exécutif et présidente du comité de gouvernance et d’éthique pendant 6 années. Elle a dirigé la refonte du cadre de gouvernance et chapeauté plusieurs dossiers notamment le déploiement d’un cadre éthique pour les administrateurs ainsi que l’acception d’une première politique de rémunération des administrateurs. Comme elle ne trouvait pas d’équilibre entre le travail et la famille dans les entreprises pour lesquelles elle a travaillé, elle devient entrepreneure en 2003 afin de répondre à ce besoin. Aujourd’hui, entourée d’une équipe de 10 professionnelles, elle est fière d’avoir créé une organisation axée sur la conciliation famille-travail. Manon Perreault est également chargée de cours à l’École de gestion de l’Université de Sherbrooke où elle sensibilise de futurs dirigeants à l’importance de la gestion socialement responsable Elle est récipiendaire du prix CIQ remis par l’ordre des CRHA en 2020. Elle est le deuxième récipiendaire de ce prix dans l’histoire de l’ordre