Recruter chez la compétition... dans les règles de l’art

Publié le 12/11/2018 à 00:30

Dans le contexte de pénurie de main-d’œuvre actuel, recruter n’est pas une mince affaire, et c’est souvent chez un compétiteur qu’on trouve les meilleures ressources. Toutefois, recruter chez la concurrence doit se faire dans les règles.

Quand l’économie va, tout ne va pas si bien… pour les recruteurs ! Si le Québec vit une situation enviable de plein emploi dans de nombreux secteurs d’activité, il fait aussi face à un problème de plus en plus criant de pénurie de main-d’œuvre spécialisée. « Dans certains secteurs d’activité, comme la restauration ou l’entretien industriel, la pénurie est devenue systémique », commente André Sasseville, avocat et associé dans le groupe droit du travail et de l'emploi au cabinet Langlois avocats.

Dans cette situation, il est légitime d’envisager de recruter chez les concurrents, une pratique tout à fait légale si elle s’exerce dans le respect de certaines balises éthiques. « Le Code civil reconnaît à tout employé le droit au travail et le droit de choisir son employeur, précise Me Sasseville. La jurisprudence établit que l’employé a le droit de se préparer à changer d’emploi lorsqu’il est en service, pourvu qu’il donne à son employeur un délai raisonnable. »

Pour courtiser les employés de ses compétiteurs, un recruteur doit toutefois adopter de bonnes pratiques, car le droit du travail reconnaît un ensemble de précautions à prendre et de règles à respecter dans ce domaine.

Attention aux clauses de non-concurrence

Avant de recruter un salarié chez un compétiteur, il faut s’assurer que celui-ci n’est pas assujetti à une clause de non-concurrence. « Ce type de clause prévoit généralement une interdiction de s’allier à un autre employeur pour un délai raisonnable après la fin de l’emploi, qui peut varier entre 6 et 18 mois, précise André Sasseville. Ce délai vise à protéger des intérêts légitimes de l’employeur précédent. Sa durée se définit en fonction de la nature de ces intérêts et de l’importance des tâches qu’effectuait l’ancien employé. »

La loi oblige bien sûr un employé à révéler à tout recruteur la clause de non-concurrence figurant sur son contrat de travail. Cette clause est valable si elle est « limitée dans le temps, circonscrite au secteur d'activité de l'entreprise et limitée géographiquement au territoire sur lequel l'employé exerce son travail. »

Un devoir de loyauté

Au Québec, où dominent l’économie du savoir et les industries créatives, le savoir-faire de chaque entreprise est sa principale ressource. Un studio d’effets spéciaux, par exemple, a le droit d’interdire à ses employés de divulguer aux concurrents les secrets de ses processus de création ou la nature de ses outils informatiques internes. « Même si une entreprise recrute un employé chez la compétition, il est en tout temps illégal pour elle de tenter d’utiliser les informations confidentielles que cet employé pourrait détenir », souligne Me Sasseville.

Pour éviter une divulgation des informations confidentielles et faire respecter ce que le droit appelle le « devoir de loyauté », la meilleure pratique serait de « demander au nouvel employé de faire disparaître de ses registres toute information sensible », indique l’avocat.

Mais qu’en est-il du réseau de contacts construit par l’employé au fil de ses années d’emploi chez le concurrent ? Comment départager les contacts personnels de ceux qui relèvent strictement de l’ancienne vie professionnelle ? L’employé fraîchement recruté peut-il, par exemple, contacter ses anciens clients pour les ramener dans le giron de son nouvel employeur ? La réponse est oui ! « Le libre marché a préséance, précise l’expert. Les clients n’appartiennent pas à l’ancien employeur et leurs coordonnées ne sont pas considérées comme des informations confidentielles. »

Faire preuve de retenue

Un employé peut néanmoins être accusé d’avoir failli à son devoir de loyauté s’il fait un démarchage systématique à partir des listes de contacts de l’ex-employeur. En somme, la modération a bien meilleur goût ! Il faut aussi vérifier si des clauses du contrat interdisent la sollicitation de clients.

En respectant cette marche à suivre, un employeur se comportera en tous points comme un bon joueur, même s’il recrute chez la compétition. Et il s’évitera, de surcroît, bien des ennuis !

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