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Comment recréer un esprit d’équipe à l’ère du télétravail

Certains rouvrent des bureaux, d’autres investissent en activités de consolidation

Carl-Éric Guertin vient d’ouvrir un bureau pour son équipe, pour rebâtir l’esprit d’équipe et mieux intégrer les nouveaux.
Carl-Éric Guertin vient d’ouvrir un bureau pour son équipe, pour rebâtir l’esprit d’équipe et mieux intégrer les nouveaux. Photo Didier Debusschère


À découvrir : Woby, l'outlis de télétravail pour les entreprises

Pour les uns, le télétravail à forte dose n’a aucun impact sur l’engagement, pour les autres il effrite le sentiment d’appartenance.
 

Carl-Éric Guertin, directeur général de la Société du réseau Économusée, a rouvert des bureaux récemment parce qu’il sentait que le télétravail à temps plein devenait mauvais pour l’organisation.

« Pour construire l’esprit d’équipe, la présence est importante. Ça brise des solitudes et ça permet de mieux accompagner les nouveaux », dit M. Guertin, qui a choisi des bureaux faciles d’accès et n’a pas imposé de journées de présence obligatoire. 

Flexibilité demandée

Même s’il a fait face à des abus en télétravail, alors que certains cumulaient deux emplois et se montraient peu disponibles, sa volonté n’est pas de contrôler les employés en rouvrant un bureau, mais de favoriser l’engagement et la compréhension de l’organisation.

Les employés aujourd’hui veulent de la flexibilité et les employeurs se creusent les méninges pour trouver l’équation qui rebâtit l’esprit d’équipe sans froisser les précieux travailleurs que tout le monde s’arrache.

Moment unique de notre histoire

« C’est unique dans notre histoire que la courbe démographique fasse en sorte que les employés ont le gros bout du bâton pour négocier », dit Karl Blackburn, président du Conseil du patronat du Québec (CPQ).

Il salue l’initiative du grand patron de Korem Sébastien Vachon, qui avec une pointe d’humour et un costume de dragon, a ouvert récemment un débat sur l’engagement au travail, en partie effrité par les fortes doses de télétravail et cette pénurie de main-d’œuvre qui permet aux employés d’être exigeants. 

« Il y a parfois des demandes irréalistes qui sont faites aux entrepreneurs », dit M. Blackburn, qui aimerait qu’on soit plus conscient de leur contribution économique et des risques qu’ils prennent.

Cultiver l’engagement demande beaucoup de créativité maintenant que la machine à café est moins fréquentée. 

Donner et redonner

Michèle Boucher de Creapub Design partait en voyage à Punta Cana cette semaine avec tout son personnel pour une réunion. 

De telles initiatives de consolidation d’équipe se multiplient pour contrer les effets du chacun chez soi vécu à forte dose depuis le début de 2020. 

« On économise en loyer parce qu’on fait la promotion du 100 % télétravail chez nous, mais on redirige l’argent dans nos réunions et activités d’équipes pour créer une ambiance de camaraderie », explique Nicolas St-Aubin chez Thirdbridge.

L’entreprise a aussi pris des mesures pour mesurer le niveau de bien-être des employés, car la distance empêche de voir ceux qui vont moins bien. De cette manière, l’engagement demeure, observe-t-il. 

Toujours être à la maison, pas bon pour l’avancement ? 

Comme consultante en gestion du changement, Anne Sérode voit des entrepreneurs inquiets des effets du télétravail sur la collaboration des équipes et l’adhésion à la culture d’entreprise. De l’autre côté, elle voit des employés qui ne perçoivent pas les avantages du travail au bureau.

« Beaucoup d’employés se croient performants à la maison parce qu’ils sont plus concentrés à la tâche. Mais la performance d’une organisation n’est pas la somme des performances individuelles. La performance est dans la capacité de travailler en mode collaboratif et de trouver des solutions en équipe », dit l’experte, vice-présidente chez TACT. 

Sortir du dialogue de sourds

Selon Mme Sérode, les employeurs qui communiquent le pourquoi d’une présence accrue au bureau ont plus de facilité à changer l’habitude qui s’est installée depuis trois ans dans le travail à la maison. 

Peut-être faut-il aussi commencer à parler des impacts potentiels sur une carrière pour que les employés perçoivent un avantage personnel à sortir du confort de leur chez-soi, songe la consultante.

« Si on reste toujours à la maison, on facilite son quotidien, c’est un avantage immédiat, mais on a moins de visibilité. Et on peut envisager que ça ait un impact sur l’avancement professionnel et sur la reconnaissance, car on peut en recevoir moins si on est loin. Le sentiment d’appartenance est aussi atteint. »

Nouvelle charge mentale

Beaucoup d’organisations sont passées au mode hybride et s’y faire n’est pas simple non plus. Autant le télétravail imposé au début de la pandémie a demandé de l’adaptation, autant l’entre-deux est exigeant. 

« C’est une nouvelle charge mentale. Tout ce qui était routine devient questionnement. À quelle heure partir pour arriver à temps ? Que faut-il apporter au bureau, où on n’a plus forcément un espace attitré ? Qui reconduit les enfants à la garderie ? C’est compliqué ! » reconnaît Anne Sérode.  

Elle choisit le retour au bureau pour se sentir plus engagée

Carl-Éric Guertin vient d’ouvrir un bureau pour son équipe, pour rebâtir l’esprit d’équipe et mieux intégrer les nouveaux.
Stacy McMenamin est au bureau cinq jours par semaine, par choix, parce qu’elle s’y sent plus concentrée et qu’elle peut séparer vie personnelle et professionnelle. Photo fournie par Emballages CARTIER

Le télétravail, Stacy McMenamin a le choix d’en faire jusqu’à quatre jours par semaine, mais elle a choisi de revenir au bureau à temps plein chez Emballage Cartier. 

« J’ai essayé le télétravail, mais je n’ai pas aimé ça parce qu’il y a trop de distractions. J’ai un TDA, j’habite en appartement et il y a une garderie à côté, donc il y a du bruit. Et puis, j’ai un sentiment d’imposteur quand je suis habillée en mou ! », dit la jeune maman de 28 ans.

Faire la coupure

Préposée aux comptes fournisseurs, Stacy aime faire la coupure entre son travail et sa vie personnelle en allant au bureau. Elle aime voir ses coéquipiers et quand elle a commencé cet emploi en 2021, il lui a été plus facile de s’intégrer dans l’entreprise en présence d’autres collègues.

« Venir au bureau rend le sentiment d’engagement plus concret pour moi. Je n’ai pas l’impression d’être un numéro, je sens l’ambiance familiale. On me dit souvent que je suis souriante et dynamique, alors peut-être que j’égaye les gens », dit celle qui avait l’impression de s’encabaner en travaillant à la maison. 

La liberté de choisir

Chez Creapub Design, la pleine liberté de choix a été offerte aux employés quant à la présence au bureau. Spontanément, la majorité de la trentaine d’employés y vient trois jours par semaine, certains y passent même cinq jours, heureux de l’ambiance de travail qu’ils y trouvent. 

« Les plus introvertis se sentent bien à la maison, mais il y en a une, l’autre jour qui m’a dit qu’elle avait oublié le plaisir de venir travailler avec les autres. Une fois qu’elle y a goûté, elle a eu envie de revenir », a remarqué la présidente Michèle Boucher.

Le désir de travailler au bureau ou à la maison varie beaucoup selon le type d’emploi, remarque Carl-Frédéric Decelles, qui dirige Kabane, une agence de marques et iXmedia, une agence numérique.

« Chez Kabane, ce sont des créatifs et ils sont à 50 % ou 70 % au bureau, alors que les programmeurs d’iXmedia aiment bien rester dans leur coin chez eux. Mais ça ne change pas nécessairement l’engagement », observe l’entrepreneur

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