La formation continue en retard au Québec

Marie-Ève Hermkens, présidente de Boomrank

Les entreprises québécoise accusent un retard dans leurs offres de formation continue. Or, la nouvelle génération mise sur un employeur à l’avant-garde de cet outil de progression pour leur carrière.


«Si elles veulent recruter et garder les talents, les entreprises n’ont pas le choix. Elles doivent proposer de la formation continue. En pleine pénurie de main-d’œuvre, un employé ne va pas hésiter à quitter pour aller vers une compagnie qui va lui permettre de progresser», insiste la présidente de Boomrank, Marie-Ève Hermkens.

Pourtant au Québec, de nombreuses industries n’ont toujours pas intégré la formation continue, par manque d’argent, de temps ou d’intérêt.

«Certains dirigeants considèrent encore en 2023 la formation continue comme une dépense, et non un investissement. C’est un aspect culturel qui doit changer si l’entreprise veut rester concurrente.»

—  Marie-Ève Hermkens, présidende de Boomrank

Sa société fondée en 2015 offre des solutions qui facilitent et simplifient la rencontre des acteurs au service de l’employabilité du Québec.

Sept ans plus tard, sa présidente souhaite aller encore plus loin pour aider les entreprises à rattraper leur retard. Un premier sommet de la formation se tiendra au Centre des congrès de Québec, le 20 avril.

«On a réalisé un sondage pour savoir quelles thématiques intéressaient les gens. On a invité 19 panélistes pour les aborder à travers 12 conférences. On veut amener les gens à réfléchir, à regarder les tendances et à se mettre en mode solution une fois de retour dans leur organisation.»

La formation emploi

Selon Mme Hermkens, plusieurs solutions existent pour implanter la formation continue dans les entreprises et attirer des salariés. L’une d’elles consiste à former à des métiers en milieu de travail.

«Les formations académiques n’existent pas ou les entreprises ont des méthodes très spécialisées, ou encore il manque de diplômés. Donc elles ont créé des mini campus à l’interne pour pouvoir combler leurs besoins», explique-t-elle.

C’est le cas de Bombardier et de l’entreprise beauceronne Solisco. L’imprimerie, située à Scott, a procédé à un virage 4.0. Pourtant, elle peine à recruter.

«Le métier n’étant pas assez valorisé, il est boudé par les jeunes. La formation académique n’existe plus. Il s’agit de métiers payants. Ces métiers sont à découvrir ou redécouvrir pour la nouvelle génération. La formation à l’interne permet d’aller chercher les employés nécessaires au bon fonctionnement de l’entreprise», mentionne-t-elle.

Dans le cas de Bombardier, le campus a été créé par manque de finissants dans les écoles.

Plus de 300 personnes sont attendues au congrès, dont 50 % viennent de l’extérieur de Québec. Pour ceux qui n’ont pas pu se procurer des billets, le sommet sera de retour l’an prochain.


UN CENTRE D’ENSEIGNEMENT DANS LES PLANS DE CANAM

La volonté de créer un centre d’enseignement progresse chez Canam à la fois pour former de futurs employés, mais également permettre aux salariés de l’entreprise d’aller chercher de nouvelles compétences.

« Les travailleurs sont exposés à de nouveaux outils et à de nouvelles façons de faire. La formation va faire partie de plus en plus du parcours d’un travailleur dans sa carrière », estime le président de Canam, Marc Dutil.

Selon M. Dutil, cet investissement dans l’apprentissage doit devenir naturel pour les entreprises si elles veulent attirer et garder des employés. « Quand on fait le sondage de la satisfaction au travail des gens, souvent il y a un besoin de clarté sur les possibilités d’avancement, sur les plans de carrière. Et puis je crois que si on veut être capable de bien recevoir ce besoin-là, il faut aussi être capable de former », affirme-t-il.

Les métiers spécialisés 2.0

De l’avis de M. Dutil, avec la robotisation, la mécanisation et l’automatisation des usines, le contenu de maintenance et de programme va devenir presque aussi important que le contenu d’opération. « J’ai l’impression que le métier de l’usine de demain, c’est un métier où on ne force pas physiquement et où on a de l’aide à la décision. Ça devient bien différent d’avant », mentionne-t-il.

Pour M. Dutil, la communication vers les jeunes doit être ciblée sur un milieu de travail attractif. « Les usines vont devenir de moins en moins intimidantes en termes d’opération. Je pense que ça ouvre la porte à de la main d’oeuvre qui ne se voit pas nécessairement dans un métier traditionnel. »main-d’œuvre qui ne se voit pas nécessairement dans un métier traditionnel. »

Et les meilleurs porte-parole ? Les travailleurs, selon M. Dutil. «Ils ont tellement de fierté à faire leur métier. À regarder la pièce une fois terminée. Ces gens-là pourraient aider à recruter. On le fait quand on recrute des ouvriers à l’étranger, mais on devrait le faire plus ici aussi », reconnaît M. Dutil, qui insiste également sur l’importance d’intégrer la nouvelle personne en créant des liens forts entre tous les membres de l’équipe.