Véritable fléau des entreprises d’aujourd’hui, les retards et les départs hâtifs font perdre temps et argent et augmentent la charge de travail de vos employé(e)s. Dans cet article nous vous donnerons des outils pour venir à bout des épisodes récurrents tout en réussissant à passer le message que, dans un contexte de relations d’emploi, l’employé(e) est assujetti(e) à certaines obligations, dont la principale est de fournir une prestation de travail. Plus vous tolérez les retards et les départs hâtifs, plus ils seront nombreux! Votre équipe vous observe ; ne lui donnez pas le prétexte d’accumuler les retards!

Saviez-vous que?

  • 20% des employé(e)s ne se laissent par influencer et respecte les règles édictées
  • 60% des employé(e)s vont se laisser influencer soit par des comportements positifs ou négatifs
  • 20% des employé(e)s vont tester continuellement les limites[i]

Si vous ne gérez pas les retards, ils ne feront qu’augmenter et la pente sera de plus en plus ardue pour redresser la situation.

À ceux qui se diront d’emblée : « j’ai compris, cessons les retards et activons les sanctions disciplinaires », mon réflexe sera de répondre : « pas nécessairement »! Bien qu’elle puisse servir à passer un message clair, la gestion disciplinaire est le dernier outil qu’un gestionnaire devrait utiliser.

Outil no1 : La politique

Avant toute chose, toutes les absences prévisibles ou non (congé parental, maladie, obligation familiale, etc.) doivent être encadrées dans une politique de gestion de l’absentéisme. Cette politique sera la pierre d’assise de votre gestion. Il ne suffit pas de la rédiger, il faut savoir l’expliquer et elle devra être signée par tout le personnel.

L’élaboration et la mise en vigueur d’un règlement d’entreprise font partie intégrante des droits de la direction. Ces droits permettent à l’employeur d’adopter des règles, afin de s’assurer de la bonne marche de son entreprise.

L’élaboration d’une telle politique doit respecter la loi sur les normes du travail et la convention collective le cas échéant. Il y a un grand travail de réflexion à faire avant d’entreprendre sa rédaction et il est fortement conseillé de se faire accompagner pour éviter de se retrouver avec une politique qui contrevient aux lois en vigueur.

Pour être valide, votre politique devra :

  1. Ne pas être en contradiction avec votre convention collective et les différentes lois du travail ;
  2. Être claire et non équivoque ;
  3. Ne pas être déraisonnable ;
  4. Être portée à la connaissance de toute personne concernée avant ou au moment de sa mise en vigueur ;

Ce point mérite une explication : pour qu’une politique soit valide et qu’elle puisse être invoquée devant un arbitre en cas de plainte, celle-ci doit être vivante dans l’entreprise et connue de tous. Il faut également en faire un rappel documenté au moins une fois par année, par exemple lors d’une rencontre d’équipe, d’une rencontre annuelle avec la direction, etc. La rencontre sera documentée dans un compte-rendu et conservée avec la présentation (par exemple le PowerPoint). Il faut pouvoir démontrer l’impossibilité que la personne plaignante ne connaissait pas l’existence de cette politique. La rigueur est donc de mise.

  1. Aviser le personnel que toute infraction à cette politique pourrait entrainer des mesures disciplinaires allant jusqu’au congédiement en cas de récidive ;
  2. Aie été appliquée de façon uniforme à partir du moment de son entrée en vigueur.

Le point 6 est probablement le plus difficile à faire, une fois que vous avez pris la décision d’élaborer et d’appliquer une politique sur la gestion des retards, vous devez vous poser la question suivante : est-ce que mon équipe de gestion sera en mesure de l’appliquer avec constance et rigueur?

Si la réponse est non, vous avez déjà une partie d’explication à vos retards.

Dans Provigo Distribution inc.[ii], une caissière avait été congédiée pour avoir payé, à six occasions, ses achats à l’aide de coupons-rabais qui ne correspondaient pas aux articles qu’elle s’était procurés. L’arbitre a modifié le congédiement en suspension, la preuve ayant révélé que la politique de l’employeur n’avait jamais été imposée de façon constante et uniforme.

Outil no2 : Le formulaire d’absence ou de retard

Ce formulaire se veut l’outil tout indiqué pour faire comprendre à l’employé(e) que son absence ou son retard n’est pas passé inaperçu et qu’il doit être justifié. Il permet aussi de passer le message que l’absentéisme est géré et, ainsi, inciter le 60 % d’individus influençables à reproduire le comportement des 20 % qui respectent les règles. À la suite d’un retard ou d’une absence, l’employé(e) doit remplir et remettre à son supérieur immédiat le formulaire d’absence qui précise les motifs de son retard. Le motif « raison personnelle » n’est pas accepté dans la jurisprudence. Le cas échéant, le supérieur devra, en cas de doute ou de répétition, rencontrer l’employé(e) concerné(e) pour obtenir des explications additionnelles.

Outil no3 : Le certificat médical

L’employeur peut demander, dans certaines circonstances, à ce que l’employé(e) lui remette un certificat médical si la raison des retards ou des départs hâtifs est en lien avec son état de santé. Comme ce document comporte des renseignements protégés par la loi, vous devez vous assurer d’avoir en place une procédure pour la cueillette et la conservation d’un tel document. Il est conseillé, avant de demander un certificat médical, de consulter votre spécialiste en ressources humaines pour connaître les limites de vos droits de gestion.

Outil no4 : L’expertise médicale

Il est possible, dans certaines circonstances, de faire passer un examen médical à un(e) employé(e) qui présente des problèmes allégués de santé ayant un impact sur sa prestation de travail. L’expertise médicale peut porter atteinte à la vie privée et les aspects liés à la confidentialité et à l’utilisation des informations sont très encadrés par les législateurs. L’expertise devrait être utilisée seulement sur recommandation de votre spécialiste en ressources humaines ou de votre avocat(e) en relations de travail.

Outil no5 : La filature

Tout comme l’expertise médicale, en plus des frais importants, la décision d’utiliser cette technique doit venir de votre spécialiste en ressources humaines ou de votre avocat(e) en relations de travail. La jurisprudence définit clairement quand la filature peut être utilisée sans contrevenir à la Charte des droits et libertés de la personne. La filature n’est pas une partie de pêche et comporte plusieurs enjeux légaux!

Outil no6 : La surveillance des médias sociaux

Il pourrait être tentant de vérifier les réseaux sociaux de l’individu qui s’absente et il est vrai que parfois, cela permet de mieux comprendre pourquoi votre employé(e) est souvent en retard le vendredi matin ou semble toujours vouloir quitter prématurément son poste de travail avant la fin de son quart. Attention! Il faudra se limiter aux éléments accessibles au grand public et faire attention aux fausses informations et interprétations. Il ne faut pas sauter trop vite aux conclusions.

Outil no7 : La gestion disciplinaire

Cet outil pourrait mériter un article à lui seul. Nous nous limiterons à préciser que la gradation des sanctions doit s’appliquer afin d’énoncer et de rappeler clairement à la personne récalcitrante les faits reprochés et les attentes futures. La rigueur d’application et de suivis sera également cruciale.

 

CONCLUSION

En conclusion, cela peut paraitre ardu, mais lorsque la politique est en place et bien communiquée, et que les gestionnaires font preuve d’un bon niveau de courage managérial, l’absentéisme diminue généralement à la satisfaction des employé(e)s et de l’employeur.

 

Un texte de Charles D’Amours, CRHA
Directeur de compte et conseiller principal en gestion des ressources humaines
cdamours@perreaultassocies.com


SOURCES

[i] Comment gérer un employé difficile. Collection Entreprendre. Drolet M. et Douville M.-J. 2004. p.24

[ii] Travailleuses et travailleurs unis de l’alimentation et du commerce, section locale 500 et Provigo Distribution inc. (Provigo St-François), D.T.E. 2001T-879.

 

Ce texte ne constitue pas un avis professionnel. Les lecteurs ne devraient pas agir sur la seule foi des informations qui y sont contenues.